Bonsoir Excalibur.
Comment répondre à tes remarques pourtant si pertinentes
Personnellement, je pense qu'il s'agissait d'un autre monde, d'une autre vie, une autre époque...
Celle où rien n'était facile, dès le plus jeune âge chaque enfant baignait dans le travail, à la maison pour l'entraide avec les frères et soeurs, puis les taches ménagères... Puis la mine...
Les paroles de Pierre BACHELET sont emplies de vérités.
A cette époque, chacun était fier d'être un "grand", de vivre la mine, même si c'était l'esclavage ou presque...
Certes, rien n'est comparable, mais je tiens à apporter mon témoignage dans les prochaines lignes...
Avant d'être gendarme, j'étais chef de chantier génie civil. J'encadrais plusieurs équipes et participais à la construction de nombreux ouvrages d'art en béton armé ou précontraint: silos, barrages, stations d'épurations, ponts, viaducs...
Mon aventure technique mais surtout humaine m'avait conduit à travailler pour la SNCF et la RATP, des puits, des galeries souterraines pour METEOR et EOLEà PARIS. Loin de toutes les technologies d'avant garde, je travaillais avec mes équipe sur les ouvrages annexes de sécurité. Puits de descente de machines, accès pompiers, galeries techniques... Tout se faisait à la main, comme dans les mines de charbon!!! Le marteau piqueur, les explosifs parfois, la pelle, la barre à mine, la sueur, le courage, la peur au ventre...
Tout ce que je peux dire, pour avoir partagé ça avec mes camarades, c'est que "la vie " était au dessus de nos têtes, c'était le toit de galerie mais aussi le front de taille... Les éboulements dus aux infiltrations d'eau, les poches de sables qui se décompressaient...
Chaque, geste de chacun d'entre nous matérialisait la vie ou la mort en cas d'erreur...
C'est très imagé, difficile à comprendre, il faut l'avoir vécu!!
Là, à des mètres sous terre, la différence de couleur de peau, de religion, n'existaient plus, tous travaillaient unis, pour la vie, cette lumière du jour que nous retrouvions à chaque fin de poste... Un travail harassant, l'humidité en permanence, merci pour les rhumatismes... Et ce bruit infernal et pour lequel aucune protection n'est réellement efficace... J'ai travaillé pendant deux ans avec 140 dB(A) en permanence dans les galeries, pour mémoire, les bouchons d'oreille et les casques anti bruit combinés n'atténuaient que de 30 dB(A)... Là aussi des séquelles...
Je voudrais parler de la poussière ingurgitée de force, malgré l'arrosage permanent... Il ne s'agit pas de la silicose des mineurs charbon, mais c'est du même style... Gorge sèche en permanence, tu craches de la poussière même le week end, deux jours plus tard... Les cloisons nasales irritées pendant des jours...
Je ne veux pas dresser un portrait dramatique de ces métiers mais j'ai un profond respect pour tous ceux qui travaillent encore dans ce domaine. Hommage aussi à tous ceux qui y ont laissé leur vie...
Je n'ai pas eu le choix professionnellement... L'industrie du charbon français était en plein déclin au début des années 90. Ma vie, mon rêve, aussi fou a t il été, c'était de devenir chef porion (chef de chantier dans les mines). J'ai toujours été passionné par ce monde de la nuit et souterrain. Au delà de cette passion, il y avait et il y a toujours le respect pour ceux de la mine, je voulais marcher dans leurs traces, moi aussi être digne et fier de leur succéder...
En 2004, je suis allé à CREUTZWALD (57), les derniers jours de LA HOUVE, la fin des charbonnages de France. Ceux qui faisaient visiter au public étaient tous anciens mineurs, j'ai partagé leur émotion en parlant de leur passé. A certains sujets abordé, tout comme eux, j'ai versé une petite larme. L'un d'eux un ex chef porion s'est approché de moi et m'a dit: "vient min tiot, jai tout d'suit vu que t'étais des not, t'cause comme mi, t'es forcément d'la mine... Vient partager m'briquet (mon casse croute) ..." C'était un mineur, un vrai, de ch'nord, un éxilé qui voulait vivre la mine jusqu'à ces derniers jours en France...
J'ai passé une journée inoubliable avec ce brave homme... des souvenirs pour la vie...
Pas de mine, dès 1991, BAC en poche, c'est le béton qui m'attendait, même pour les ouvrages souterrains.
Chaque jour de ma vie, je songe à cette vie sous terre, à cette statue de Sainte BARBE à chaque entrée de galerie. Loin de toute tradition, c'est presque une "religion".
Alors, sans animosité, sans méchanceté aucune, j'ai mal au coeur de voir les générations se succéder et se plaindre sans cesse du travail. Les mineurs n'étaient pas uniques, mais je pense sincèrement que c'est un des métiers les plus durs...
Alors, s'il vous plait, respect pour eux, pour leur fierté, leur mémoire...
Merci à ceux qui auront eu la patience de me lire jusqu'à mes derniers mots...
Gilles.
S'il y a des gens curieux ou tout simplement intéressés, je peux mettre en ligne quelques liens sur le sujet, quelques photos en attendant de créer une page web sur tout ce qui me tient à coeur dans la vie...
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